Face à la crise
La Confédération européenne des syndicats
réclame un "nouveau deal"
La Confédération européenne des syndicats
réclame un "nouveau deal"
Déclaration de Paris de la CES le 28 mai 2009
mercredi 10 juin 2009
Cette forte augmentation du chômage s’explique par la domination du modèle économique néolibéral au cours des 30 dernières années, un modèle dont l’effondrement a provoqué la catastrophe économique que l’Europe et le reste du monde connaissent aujourd’hui. Nombreux sont ceux qui se sont adonnés à une version moderne de l’alchimie parmi les leaders du secteur des services financiers pléthorique. A Wall Street, à Londres et dans toutes les autres places financières de premier plan, la prudence à long terme a été négligée au profit de la cupidité et de la spéculation. Avant l’effondrement on a ainsi assisté à une forte augmentation de l’inégalité, à la croissance des emplois précaires et à des pressions visant à réduire l’influence des états providence, les droits des travailleurs et les négociations collectives. Il convient d’y ajouter aujourd’hui un chômage croissant, des réductions des dépenses publiques et un effondrement de la demande dans de nombreux pays. Les citoyens se tournent vers les gouvernements à travers l’action du secteur public, et vers les syndicats pour établir l’équilibre démocratique qui a été cédé aux marchés. La CES demande que « jamais plus » le capitalisme financier ne puisse infliger une crise comparable au monde, à l’Europe et aux travailleurs ; et que jamais plus les inégalités croissantes ne suscitent l’encouragement, l’indifférence ou la négligence des gouvernements démocratiques.
La CES soutient pleinement la cause du mouvement syndical international dans la lutte contre la crise. L’Europe a un rôle important et spécifique à jouer dans ce contexte. L’UE est la seule dans le monde à avoir la capacité d’exercer une action directe et coordonnée sur ce qui constitue la plus grande entité économique individuelle au monde. Elle doit donc ouvrir la voie, et non emboîter le pas. On a trop eu l’impression qu’elle était cantonnée à un second rôle, derrière celui des grands pays. Or, si l’UE n’est pas capable de mener une action concertée en faveur du progrès économique et social, ses principales réalisations que sont le marché unique, la monnaie unique et l’élargissement seront soumises à une pression accrue car les Etats membres chercheront à développer leurs propres approches en matière de commerce, de politique monétaire et de relations internationales. L’UE doit assumer ses responsabilités par rapport aux Etats membres tout en subissant une extrême pression, et agir de manière à éviter de dépendre du Fonds monétaire international. L’intervention doit en tout cas viser à préserver la cohésion sociale, plutôt que de réduire les dépenses publiques et les services publics.
L’UE doit adopter une approche convaincante face au chômage. La CES réclame un nouveau Deal social dans l’UE en guise de moteur de justice sociale et en faveur d’emplois plus nombreux et de meilleure qualité, avec les principaux points suivants : Des emplois plus nombreux et de meilleure qualité : investir dans un vaste plan européen de relance afin d’insuffler un nouvel élan en faveur de la croissance et des emplois.
La CES demande au Conseil européen et à la Commission de concevoir un plan européen d’investissement totalisant 1% annuel du PIB européen pour les trois prochaines années afin d’offrir des emplois plus nombreux et de meilleure qualité, d’encourager l’innovation, la recherche et le développement, de favoriser l’emploi dans les secteurs clés, d’investir dans les nouvelles technologies vertes et durables, et d’assurer des services publics de grande qualité. L’éducation et la formation tout au long de la vie sont des éléments essentiels dans le développement d’emplois plus nombreux et de meilleure qualité. Il est maintenant temps pour l’Europe d’offrir aux travailleurs les qualifications requises pour une économie de demain sobre en carbone, à travers des technologies vertes et des emplois plus qualifiés.
Des systèmes de protection sociale plus forts afin d’assurer plus de sécurité et d’éviter l’exclusion sociale. La CES réclame un agenda social européen puissant et constructif afin de permettre aux gens de conserver un emploi bien rémunéré et de garantir la protection de tous travailleurs ainsi qu’une formation appropriée, en tenant compte de la diversité, particulièrement dans le respect de l’égalité homme-femme, et de la nécessité de préserver la cohésion sociale et l’accès aux services publics pour tous. La politique sociale et les services publics à travers l’Europe doivent être préservés, renforcés et non affaiblis par une application rigide du Pacte de Stabilité, contraignant à des compressions prématurées et importantes dans les déficits budgétaires une fois que l’activité économique cesse de reculer. De telles compressions priveraient les états membres de bénéficier de la relance économique et endommageraient les services publics.
Des droits plus forts pour les travailleurs et la fin de la prépondérance des principes de marché à court terme. Pour mettre fin aux inégalités croissantes, il faut disposer de droits plus forts, en particulier au niveau transnational. La CES demande un Protocole de progrès social donnant la priorité aux droits sociaux et à l’action collective et un renforcement de la directive sur le détachement de travailleurs fondé sur l’égalité de traitement et le respect au droit qui est d’application dans le lieu de travail. La CES réclame également une participation effective des travailleurs et une démocratie économique, sociale et dans le monde du travail. Il est particulièrement urgent de renforcer les droits des travailleurs afin de mettre un terme à l’utilisation croissante de diverses formes de travail atypiques et peu sûres. Une directive temps de travail contraignante et sans dérogation est primordiale.
Un meilleur salaire : le renforcement des négociations collectives. Il faut rejeter les gels de salaires, les baisses du salaire nominal et des pensions. À un moment où la demande s’effondre, il est essentiel de protéger le pouvoir d’achat. La CES demande par conséquent un renforcement des négociations collectives et des instruments de formation de salaire avec l’objectif d’assurer des niveaux de salaire minimum décent dans tous les pays européens et des augmentations du salaire réel et des pensions pour soutenir la reprise économique. La Banque Centrale Européenne (BCE) doit également être impliquée dans la croissance et dans la recherche d’un plein emploi de qualité, et pas simplement dans la stabilité des prix. La BCE ne doit pas chercher à influencer et à affaiblir les négociations salariales en augmentant prématurément les taux d’intérêt dès que la crise immédiate semble être terminée. La CES demande à la BCE un conseil consultatif de partenaires sociaux européens.
La solidarité européenne en guise de protection contre les excès du capitalisme financier : il est essentiel de mettre en place une réglementation effective des marchés financiers et une distribution équitable des richesses, et d’éviter un retour au capitalisme casino ou au « statu quo » des 20 dernières années sur les marchés financiers. La CES réclame une augmentation importante des dépenses sociales européennes en élargissant les activités des fonds structurels européens, notamment le Fonds social européen et le Fonds européen d’ajustement à la mondialisation. Il faut également lutter contre la concurrence fiscale et supprimer les paradis fiscaux parce qu’ils menacent la base fiscale des états et l’Europe sociale. Plus spécifiquement, il s’agit d’oeuvrer dans le sens d’une harmonisation des impôts sur les sociétés. Une initiative européenne doit être prise en matière d’imposition des opérations financières. Il est essentiel de renforcer l’intégration des questions sociales dans toutes les politiques européennes et d’introduire des dispositions sociales dans les marchés publics, en reconnaissant les conventions collectives appropriées, en s’assurant que la concurrence n’est pas pervertie par un dumping social ou par des politiques déflationnistes, en protégeant les retraites et les allocations sociales, et en renforçant les salaires minimum et la couverture des négociations collectives. La dimension sociale de l’Europe est trop modeste depuis trop longtemps. Il est temps à présent de renforcer l’Europe et de rétablir ses ambitions sociales. Au cours de la période à venir, la CES élaborera sa stratégie et se mobilisera afin de relever les énormes défis qui nous attendent, notamment dans la perspective d’une politique industrielle basée sur l’innovation, la recherche et le développement durable. Plus particulièrement, la CES et ses affiliés se mobiliseront le 7 octobre pour soutenir la journée d’action mondiale de la CSI sur le travail décent. La CES appelle le Conseil européen, le nouveau Parlement européen et la nouvelle Commission à agir rapidement. La CES insiste auprès du patronat pour qu’il s’engage dans un dialogue social sur de telles questions et participe à la résolution de la crise.
Le double objectif de cette Déclaration est le suivant : combattre la crise et gagner demain. Ses idées doivent être largement diffusées et débattues car la déroute du monde financier frappe durement l’Europe. Mais le syndicalisme européen doit saisir cette occasion pour aboutir à une meilleure société, plus équitable, et à une Europe sociale plus forte et plus intégrée. La participation massive des travailleurs aux manifestations de la CES de la mi-mai témoigne d’un soutien exponentiel pour notre agenda. Les organisations affiliées s’engagent à se mobiliser derrière la Déclaration de Paris de la CES.
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