Besoin d’un choc de démocratie sociale
Une interview d’Agnès Le Bot, dirigeante nationale de la CGT.
Un
récent sondage montre que 73% des Français pensent que les syndicats
doivent être mieux associés à l’élaboration de la stratégie des
entreprises et 81% estiment qu’un dialogue social de qualité serait un
moyen d’améliorer les conditions de travail. Dans ce contexte, pensez
vous que le projet de loi sur la formation professionnelle et la
démocratie sociale actuellement en débat au Parlement répond à ce besoin
de démocratie sociale ?
Agnès Le Bot : La CGT a formulé des propositions dans le cadre de l’élaboration de la loi pour rapprocher plus encore l’action des syndicats, des élus du personnel, des aspirations concrètes des salariés.
Globalement ce projet n’est pas satisfaisant et comporte même certains reculs injustifiables.
Nous obtenons l’amélioration des élections dans les entreprises, de leur transparence vis-à-vis des salariés.
En outre, il sera possible de désigner le Délégué Syndical sur le périmètre d’un établissement et pas systématiquement sur celui du comité d’entreprise comme le voulait le patronat. C’est une bonne nouvelle pour un syndicalisme de proximité avec les salariés, les syndiqués.
Mais d’autres dispositions entachent ce projet de loi : le gouvernement s’est refusé à instaurer de véritables instances représentatives du personnel pour les salariés des très petites entreprises, soit 4, 6 millions de salariés ! C’est une capitulation vis-à-vis du Medef et un manque d’ambition en matière de démocratie sociale.
Enfin plusieurs dispositions sont de véritables reculs, elles sont d’autant plus condamnables que des propositions alternatives ont été formulées mais balayées d’un revers de la main. Je pense à la représentativité patronale, au financement du syndicalisme et à la désignation des conseillers prudhommes, à la partie traitant de l’inspection du travail.
La mesure de la représentativité des organisations syndicales a changé, celle proposée pour le patronat ne vous convient pas ?
Agnès Le Bot : La représentativité patronale est un sujet pour les employeurs, mais aussi pour les salariés. Ce dont on parle, c’est de la légitimité des employeurs à signer des accords de branches et au niveau interprofessionnel qui s’appliquent aux salariés.
Pour être représentatif, il faut remplir notamment un critère d’audience auprès de ceux que l’on représente. Pour les syndicats, c’est le vote des salariés, tandis que pour les employeurs ce sera l’adhésion à une ou des organisations patronales.
Ce projet satisfait les organisations patronales mais n’a rien de démocratique et transparent. D’ailleurs sur le fond , avec ce système d’adhésion, c’est une forme de suffrage censitaire qui s’applique : "pour pouvoir compter, il faut payer !"
De plus, les salariés sont un peu plus dépossédés de leur droit à la négociation collective, avec l’instauration d’un droit patronal d’opposition à l’extension des accords. Seul le point de vue patronal a été entendu par le gouvernement. C’est un parti pris inacceptable, alors même qu’au-delà des propositions faites par la CGT, le Conseil Économique Social et Environnemental est en train de travailler sur ce sujet.
Le gouvernement envisage la suppression des élections prud’homales et la désignation des juges pour les conflits du travail par les organisations syndicales. Vu la faible participation à ces scrutins, ce n’est pas une mesure de bon sens ?
Agnès Le Bot : Il faut d’abord rappeler ce que sont les conseils de prudhommes pour les salariés. Avoir des juges élus par les salariés eux-mêmes, c’est une force inestimable pour obtenir réparation d’un préjudice subi par le salarié sur son salaire, le respect de son contrat de son travail par exemple. De nombreux salariés y ont recours au moins à un moment de leur vie professionnelle.
Oui, il y a un problème de participation aux élections prud’homales. La CGT ne conteste pas ce diagnostic. Mais il est curieux de mettre en avant cet argument aujourd’hui, alors même que rien n’a été fait depuis les dernières élections pour faire reculer l’abstention. Le Conseil Supérieur de la Prud’homie était chargé d’y travailler : malgré nos rappels et nos propositions, rien n’a été fait.
Par ailleurs, l’élection prud’homale est-elle la seule élection au suffrage universel où la participation connaît des limites ? Bien sûr que non ! Supprime-t-on les élections consulaires des tribunaux de commerce qui reposent sur une participation des employeurs inférieure à 20% ?
Le mode de désignation proposé par le gouvernement est pour le moins bancal et peu démocratique.
En votant dans les entreprises ou dans le cadre des élections TPE au cours des quatre dernières années, les salariés n’ont absolument pas été prévenus qu’il votaient aussi pour leurs conseillers prud’homaux. Une véritable démocratie sociale ne peut fonctionner comme cela.
Le débat parlementaire sur ce projet de loi aura lieu au printemps. Les salariés ont toutes les raisons de se mobiliser en signant la pétition de la CGT pour obtenir la tenue des élections prud’homales au suffrage universel dès 2015.
Agnès Le Bot : La CGT a formulé des propositions dans le cadre de l’élaboration de la loi pour rapprocher plus encore l’action des syndicats, des élus du personnel, des aspirations concrètes des salariés.
Globalement ce projet n’est pas satisfaisant et comporte même certains reculs injustifiables.
Nous obtenons l’amélioration des élections dans les entreprises, de leur transparence vis-à-vis des salariés.
En outre, il sera possible de désigner le Délégué Syndical sur le périmètre d’un établissement et pas systématiquement sur celui du comité d’entreprise comme le voulait le patronat. C’est une bonne nouvelle pour un syndicalisme de proximité avec les salariés, les syndiqués.
Mais d’autres dispositions entachent ce projet de loi : le gouvernement s’est refusé à instaurer de véritables instances représentatives du personnel pour les salariés des très petites entreprises, soit 4, 6 millions de salariés ! C’est une capitulation vis-à-vis du Medef et un manque d’ambition en matière de démocratie sociale.
Enfin plusieurs dispositions sont de véritables reculs, elles sont d’autant plus condamnables que des propositions alternatives ont été formulées mais balayées d’un revers de la main. Je pense à la représentativité patronale, au financement du syndicalisme et à la désignation des conseillers prudhommes, à la partie traitant de l’inspection du travail.
La mesure de la représentativité des organisations syndicales a changé, celle proposée pour le patronat ne vous convient pas ?
Agnès Le Bot : La représentativité patronale est un sujet pour les employeurs, mais aussi pour les salariés. Ce dont on parle, c’est de la légitimité des employeurs à signer des accords de branches et au niveau interprofessionnel qui s’appliquent aux salariés.
Pour être représentatif, il faut remplir notamment un critère d’audience auprès de ceux que l’on représente. Pour les syndicats, c’est le vote des salariés, tandis que pour les employeurs ce sera l’adhésion à une ou des organisations patronales.
Ce projet satisfait les organisations patronales mais n’a rien de démocratique et transparent. D’ailleurs sur le fond , avec ce système d’adhésion, c’est une forme de suffrage censitaire qui s’applique : "pour pouvoir compter, il faut payer !"
De plus, les salariés sont un peu plus dépossédés de leur droit à la négociation collective, avec l’instauration d’un droit patronal d’opposition à l’extension des accords. Seul le point de vue patronal a été entendu par le gouvernement. C’est un parti pris inacceptable, alors même qu’au-delà des propositions faites par la CGT, le Conseil Économique Social et Environnemental est en train de travailler sur ce sujet.
Le gouvernement envisage la suppression des élections prud’homales et la désignation des juges pour les conflits du travail par les organisations syndicales. Vu la faible participation à ces scrutins, ce n’est pas une mesure de bon sens ?
Agnès Le Bot : Il faut d’abord rappeler ce que sont les conseils de prudhommes pour les salariés. Avoir des juges élus par les salariés eux-mêmes, c’est une force inestimable pour obtenir réparation d’un préjudice subi par le salarié sur son salaire, le respect de son contrat de son travail par exemple. De nombreux salariés y ont recours au moins à un moment de leur vie professionnelle.
Oui, il y a un problème de participation aux élections prud’homales. La CGT ne conteste pas ce diagnostic. Mais il est curieux de mettre en avant cet argument aujourd’hui, alors même que rien n’a été fait depuis les dernières élections pour faire reculer l’abstention. Le Conseil Supérieur de la Prud’homie était chargé d’y travailler : malgré nos rappels et nos propositions, rien n’a été fait.
Par ailleurs, l’élection prud’homale est-elle la seule élection au suffrage universel où la participation connaît des limites ? Bien sûr que non ! Supprime-t-on les élections consulaires des tribunaux de commerce qui reposent sur une participation des employeurs inférieure à 20% ?
Le mode de désignation proposé par le gouvernement est pour le moins bancal et peu démocratique.
En votant dans les entreprises ou dans le cadre des élections TPE au cours des quatre dernières années, les salariés n’ont absolument pas été prévenus qu’il votaient aussi pour leurs conseillers prud’homaux. Une véritable démocratie sociale ne peut fonctionner comme cela.
Le débat parlementaire sur ce projet de loi aura lieu au printemps. Les salariés ont toutes les raisons de se mobiliser en signant la pétition de la CGT pour obtenir la tenue des élections prud’homales au suffrage universel dès 2015.
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