En chute libre dans les sondages, notre Sarko national ? Allons donc ! Regardez sur cette photo publiée lundi dernier en "une" du Financial Times comme il a l'air épanoui. Un vrai premier de la classe européenne. Le contraste avec ses collègues est saisissant. Mais que peuvent-ils bien chercher ainsi ? La puce du portable de Gordon Brown ? Le ticket de vestiaire d'Angela Merkel ? Un plan européen de relance de l'économie ? Un brin amusé, Nicolas Sarkozy les observe. Heureux comme un président de la République française à Berlin après une réunion de dirigeants européens ! "Le plus dur, c'est d'être élu, après, gouverner, c'est fastoche", avait coutume de dire le candidat Sarkozy. Il aurait dû préciser : gouverner l'Europe, ou même gouverner le monde. Parce qu'en France c'est une tout autre histoire !
Pensez : au moment même où le chef de l'Etat paradait en Allemagne, Laurence Parisot, la patronne du Medef, se livrait à une critique en règle de sa politique et de sa trop grande facilité à céder aux syndicats. "Aujourd'hui, déclarait-elle sur Europe 1, nous sommes inquiets par un certain nombre de décisions, une certaine façon d'appréhender les dossiers et il me semble que nous avons oublié que la priorité des priorités doit être l'emploi." Critiquant certaines des mesures sociales envisagées lors du sommet social du 18 février, la patronne du Medef résuma ainsi sa pensée : "Il faut cesser de présenter les choses comme si on était tous en train de faire la queue devant le Pôle emploi." Assurément, personne n'avait imaginé une seconde Mme Parisot en pareille posture.
La présidente du Medef est une spécialiste de ce genre de petites phrases bien ciselées. On lui doit en particulier ces deux adages : "La liberté de penser s'arrête là où commence le code du travail" et "La vie, la santé, l'amour sont précaires, pourquoi le travail échapperait-il à cette loi ?". On pourrait d'ailleurs mettre toutes ces perles bout à bout et établir une sorte de "ligne Parisot". On s'apercevrait alors qu'il n'y a guère de différence avec la manière qu'avait son prédécesseur, le très brocardé baron Ernest-Antoine Seillière, de défendre les intérêts patronaux. Les mots sont différents, le phrasé n'est pas le même, mais le fond est identique. Crise ou pas crise, il faut avoir les idées claires, martèle la patronne du Medef : "Le travail est rémunéré par les salaires et le capital par les dividendes." Point barre, le reste n'est que balivernes pour salariés tout juste capables de manifester. Commentant la journée de protestation du 29 janvier, Mme Parisot s'était d'ailleurs déclarée "consternée", y voyant "quelque chose de pervers" qui "coûte cher et ruine la réputation de la France".
Fort heureusement, tous les patrons et banquiers ne campent pas sur cette ligne. "La crise montre l'importance de mieux d'Etat et de plus d'Etat. L'autorégulation : cela ne marche pas. (…) Il n'y a pas, pour sortir de la crise, d'alternative à l'intervention de l'Etat. Il faut même aller plus vite et plus fort", déclarait ainsi Matthieu Pigasse, associé gérant à la banque Lazard, lundi dernier au Figaro. Pour l'heure, Nicolas Sarkozy n'a pas vraiment choisi. Il n'est jamais simple de se brouiller avec ses "amis", fussent-ils aussi encombrants. Ligne Parisot ou non, de sa décision dépendra sans doute en grande partie l'issue de son quinquennat.
Franck Nouchi
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