Un centenaire haï de l’UMP et du Medef
Le Code du travail, qui fête ses cent ans aujourd’hui, est la cible de toutes les attaques depuis trois ans. Durée du travail, droit de grève, retraite sont des enjeux de luttes toujours actuels.Cent ans après sa naissance, le Code du travail est toujours le spectre qui hante les cauchemars du patronat. «La liberté d’entreprendre s’arrête là où commence le Code du travail», estimait Laurence Parisot, l’actuelle patronne du Medef en janvier 2005. Difficile de formuler une déclaration de guerre plus directe à la législation sociale. Aussi le Medef plaçait-il ses espoirs, en 2007, dans l’élection d’un président et d’une majorité qui soient déterminés à agir contre les « excès de la fiscalité, les excès du Code du travail, (…) l’hyper-réglementation », qui « oppresse(nt) et opprime(nt) bien inutilement et bien dangereusement les entreprises françaises ».
Vœu exaucé avec l’élection de Nicolas Sarkozy. Depuis 2007, le gouvernement n’a eu de cesse de s’attaquer au Code du travail. Cela a commencé dès l’élection de Nicolas Sarkozy avec la loi dite Tepa « en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat », qui a incité les employeurs à faire travailler leurs personnels en heures supplémentaires exonérées de cotisations sociales plutôt que d’embaucher, permettant de contourner la durée légale des 35 heures. Une loi bientôt suivie d’une autre, la « loi Bertrand », du nom du ministre des Affaires sociales de l’époque, Xavier Bertrand, entrée en vigueur en août 2008. Celle-ci a élargi la notion de « forfait jour » pour quantifier la durée du travail, qui peut désormais atteindre 235, voire 282 jours par an, pour certaines catégories de salariés, soit le maximum toléré en Europe, contre 218 jours auparavant. « C’est la fin des 35 heures imposées », se réjouissait alors Xavier Bertrand en faisant adopter sa loi par le Parlement. La fin des 35 heures, et même pis que cela, puisque les salariés concernés peuvent ainsi travailler davantage qu’avant les lois Aubry, congés payés et dimanches inclus.
Trois réformes menées tambour battant
Autre grand chantier de déréglementation attaqué par le pouvoir sarkozyste : celui du travail dominical. Après un premier recul en 2008 face à l’opposition des syndicats, le projet est revenu sous la forme d’une proposition de loi UMP, en 2009, qui autorise le travail du dimanche dans les zones dites « touristiques », sans que les salariés n’aient la liberté de choix vantée par la droite pour faire passer son projet.
Après la durée du travail et les jours de repos, il restait au moins encore trois grandes réformes à engager pour satisfaire les exigences patronales : faciliter les procédures de licenciement, restreindre le droit de grève, s’attaquer au droit à la retraite à 60 ans. Trois réformes menées tambour battant. D’abord avec la loi sur le dialogue social du 21 août 2007, qui a instauré le service minimum dans les transports terrestres, imposant aux salariés de déclarer deux jours à l’avance leur intention de participer à la grève. Les syndicalistes ont eu beau dénoncer une entorse au droit de grève inscrit dans la Constitution, rien n’y a fait : la droite est passée en force. Puis ce fut le tour de la mise en œuvre de la « rupture conventionnelle du contrat de travail », résultant de la loi du 25 juin 2008, transposant dans le droit l’accord interprofessionnel du 11 janvier 2008. Outre l’allongement de la période d’essai du salarié, votée au passage, cette loi permet à l’employeur de licencier son salarié selon une procédure « amiable », dérogatoire aux garanties et recours prévus dans le Code du travail. Surtout, cette innovation présuppose pour la première fois une relation d’égalité entre l’employé et son patron, au lieu de la relation de subordination jusqu’alors reconnue au salarié, qui lui valait une certaine protection.
Dernière réforme en date, et non des moindres : celle qui a allongé de deux ans l’âge de la retraite. Mais au prix, cette fois, d’un divorce profond et durable avec l’opinion, qui a manifesté durant deux mois de lutte son rejet de l’injustice de la politique menée depuis trois ans.
Sébastien Crépel
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