Sur la plage de Chittagong, au sud-est du Bangladesh, des enfants découpent des carcasses de navires toujours imprégnés de déchets toxiques. Sans aucune protection, les pieds souvent nus au milieu de rejets pollués qui, en grande partie, repartiront à la mer. Le travail des enfants, interdit par l'Organisation internationale du travail, se fait ici dans les pires conditions.
Un rapport sur "Ces chantiers qui brisent l'enfance" de la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH), publié mardi 16 septembre, dénonce cette situation qui perdure depuis des années, affirme l'organisation, sous l'oeil consentant du gouvernement. Scandale humain et environnemental, Chittagong est le premier chantier au monde de démantèlement des navires en fin de vie. Le mépris des normes sociales et environnementales dont font preuve les entrepreneurs du secteur attire les propriétaires de navires qui, à 700 dollars la tonne, vendent ici les carcasses deux fois le prix qu'ils en tireraient, par exemple, en Chine.
"Les entrepreneurs qui n'ont à supporter aucun frais de traitement des déchets avant de recycler l'acier et rémunèrent leurs travailleurs une misère peuvent se permettre de payer les carcasses plus cher", explique Ingvild Jenssen, de la plate-forme d'ONG pour le démantèlement des bateaux, basée à Bruxelles.
C'est en somme la négation du principe pollueur-payeur et des règles instituées au niveau international par la convention de Bâle, qui oblige tout propriétaire de bateau à assumer les coûts de dépollution avant de se débarrasser de son épave dans un pays en développement.
A Chittagong, on paie pour récupérer un acier pollué, qui sera ensuite écoulé sur le marché intérieur. "Un tiers de l'acier utilisé par l'industrie locale proviendrait de Chittagong qui, dans ce pays très pauvre, procure une source d'approvisionnement bien moins chère que le marché mondial", souligne Isabelle Brachet de la FIDH. Le rapport estime que 20 % de la main-d'oeuvre de Chittagong est composée de mineurs de moins de 15 ans. Pour la plupart, il s'agit de migrants venus du nord du pays, ayant quitté leur village pour assurer un revenu à leur famille.
Les multiples témoignages recueillis mettent en avant les maladies auxquelles sont confrontés ces milliers d'enfants au contact de matières toxiques comme l'amiante, les pyralènes ou les résidus de pétrole. À l'intérieur des carcasses, ils sont victimes d'évanouissements récurrents liés à l'inhalation de gaz et de fumées.
A Chittagong, il ne se passe pas un jour, constate la FIDH, "sans qu'un travailleur ne tombe malade, ne se blesse ou bien meure". L'ONG veut interpeller l'Union européenne dont provient une grande partie des navires à démanteler. Elle souhaite que des mesures plus contraignantes soient prises pour que les armateurs ne puissent plus détourner avec autant de facilités les conventions internationales.
Laurence Caramel
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mercredi 17 septembre 2008
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