mercredi 4 juin 2008

35 heures : le démontage en règle


En profitant du texte sur la représentativité syndicale pour y glisser une remise en cause de la durée du travail, le gouvernement rallume la "guerre des 35 heures". Nombreuses protestations de l’opposition contre cette attaque. Sur le plan syndical, une journée d’actions sur les retraites et le temps de travail est en préparation pour le 17 juin. Même si quatre confédérations ont annoncé leur non-participation, la CGT espère une très forte mobilisation.

Retrouvez le dossier complet avec un décryptage du projet gouvernemental dans l’Humanité, édition du jeudi 5 juin.

L’objectif, ambitieux, est donné par Bernard Thibault, secrétaire général de la CGT : le mardi 17 juin, la journée d’actions sur les retraites et le temps de travail doit rassembler 1 million de manifestants. « Nous devons être plus nombreux dans la rue le 17 juin que nous l’avons été le 22 mai. Il y avait 700 000 manifestants, il en faudrait 1 million… », a déclaré hier le cégétiste interviewé par le Parisien. « C’est aux salariés, par leur mobilisation le 17 juin et dans les entreprises, de dire haut et fort que les syndicats les représentent et qu’il faut les entendre. » Faute de quoi « le gouvernement a l’intention de n’en faire qu’à sa tête », prévoit le leader syndical : il imposera l’allongement de la durée de cotisations pour les retraites, et une nouvelle déréglementation du temps de travail, prévue dans le projet de loi qui sera présenté en Conseil des ministres le 18 juin.

LE HANDICAP DE LA DÉSUNION SYNDICALE

Cet appel à une très forte mobilisation devra pourtant surmonter le handicap, relatif, de la désunion syndicale. Si les Solidaires ont déjà annoncé, vendredi, leur ralliement à la journée d’actions, les quatre autres organisations syndicales ont, les unes après les autres, décliné l’invitation. En première ligne, Jean-Claude Mailly, pour Force ouvrière, a annoncé sur LCI que son organisation n’appellerait pas au 17, arguant qu’« une manifestation de plus, ce n’est pas ça qui fera changer le gouvernement ». Dans le même esprit, avant que la position officielle de son syndicat ne soit annoncée, le président de la CFE-CGC Bernard Van Craeynest a fait valoir que « les manifestations sont un sport national qui ne fait pas beaucoup changer les positions ou évoluer les choses » et proposé le lancement d’une « grande pétition nationale » sur le temps de travail – sans oser affirmer qu’une pétition serait plus efficace qu’une manifestation… Enfin, l’UNSA et la CFTC ont également annoncé leur non-participation. L’union « autonome » estime que la CGT et la CFDT doivent « assumer les conséquences » de leur signature, tandis que la CFTC a annoncé préparer avec d’autres partenaires syndicaux des « actions spécifiques » sur les retraites et les 35 heures, et demande à la CGT et à la CFDT d’« éteindre l’incendie » en retirant leur signature. De façon plus ou moins véhémente, ces quatre organisations reprochent en effet à la CGT et la CFDT d’avoir signé avec le patronat une « position commune » sur la représentativité. Un texte dont l’article 17 – seul article consacré au temps de travail – autorisait « à titre expérimental » le relèvement du contingent d’heures supplémentaires dans une entreprise, à condition d’avoir l’accord de syndicats représentant la majorité absolue des salariés. En reprenant cette position commune pour en faire un projet de loi, le gouvernement a transformé cet article en un volet complet déréglementant très largement et sans gardefou le temps de travail dans l’entreprise. Pour FO, par exemple, la CGT et la CFDT « ont donné le feu vert » en signant leur position commune, et « le gouvernement s’est engouffré là-dedans ». En réalité, le désaccord des quatre porte moins sur le temps de travail que sur la représentativité : la « position commune » renforce le principe majoritaire pour la validité des accords, ce qui réduit le pouvoir des « petits syndicats » qui, jadis, pouvaient signer un accord avec un employeur même en ne représentant que 2 % des salariés d’une entreprise… « Ces syndicats ont du mal à avouer leur désaccord sur les nouvelles règles de représentativité et se servent de l’alibi que leur fournit le gouvernement en s’attaquant aux 35 heures », leur rétorque Bernard Thibault, qui les accuse de « faire le jeu du gouvernement » en n’appelant pas à manifester.

Fanny Doumayrou paru dans l’Humanité du 3 juin 2008


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