La Commission européenne a présenté mercredi deux textes qui soumettent le droit du travail et de grève au respect des « libertés économiques » inscrites dans les traités.
La Cour de
justice européenne (CJE) soumet le droit de grève au droit de la concurrence ?
Circulez, il n'y a rien à voir, répond la Commission européenne, qui a présenté
mercredi deux projets de législation qui ne remettent pas en cause la
jurisprudence antisociale de la Cour.
De quoi
s'agit-il ? En 2007, une entreprise lettone, Laval, remporte le marché de la
construction d'une école à Vaxholm, en Suède. Les syndicats qui ont organisé un
blocus pour obliger Laval à respecter la convention collective du bâtiment
suédois ont été condamnés par la Cour de justice européenne (CJE). Dans le
jugement « Viking Line », cette même cour a interdit aux syndicats finlandais
de faire grève pour faire appliquer le droit finlandais au lieu du droit
estonien sur les bateaux qui font la navette entre les deux pays.
Pour la
Confédération européenne des syndicats (CES), qui se bat contre les
conséquences des jugements de la CJE, le règlement proposé mercredi par la
Commission ne change rien à la situation présente.
Au contraire ! Le droit de
grève est placé au même niveau que les libertés économiques de l'Union
européenne : liberté de prestation de services et d'établissement des
entreprises. Et le règlement prévoit un « principe de proportionnalité »,
s'inquiète Veronica Nilsson, secrétaire confédérale de la CES. Les tribunaux
nationaux pourraient limiter le droit de grève pour qu'il respecte les «
libertés économiques ».
L'article 2 du texte indique que l'exercice du droit de
grève « doit respecter ces libertés économiques ». La CES critique une
réglementation qui « affaiblit le droit de grève », tout comme les groupes
socialiste, Verts et de la Gauche unitaire européenne (GUE) au Parlement européen.
Le deuxième
texte présenté par la Commission est censé pallier les manques de la directive
sur le détachement des travailleurs. Selon cette dernière, l'entreprise d'un
pays A qui détache des salariés dans un pays B doit respecter le droit du
travail du pays B, mais partiellement seulement.
La CJE a condamné un Land
allemand qui imposait à une entreprise polonaise de respecter la convention
collective locale. Ce qui n'est pas prévu par la directive. Rien dans la
proposition de la Commission ne vient assurer une égalité de traitement entre
travailleurs du pays d'accueil et du pays d'origine. En conséquence, Thomas
Händel, député allemand de la GUE, demande le rejet de ces textes et
l'inscription d'une clause de progrès social dans les traités. C'est là une revendication
de la CES, qui souhaite voir écrit clairement dans le droit européen qu'en cas
de conflit entre libertés économiques et droits sociaux, c'est à ces derniers
d'avoir le dessus.
Gaël
De Santis
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