«Si Sarkozy est réélu, la précarité deviendra la
règle!»
Contrairement aux traditions de la centrale, le secrétaire général de la CGT milite activement contre la réélection du président sortant
Le Nouvel Observateur Comment
avez-vous réagi aux annonces faites le 5 avril par le chef de l'Etat et à sa
lettre aux Français?
Bernard Thibault
Le candidat
s'inscrit dans les pas du président sortant: l'austérité et les reculs sociaux
seront au menu, même s'il cherche à les masquer. Pour lui, le coût du travail
est trop important, alors qu'un salarié sur deux ne gagne pas 1 500 euros!
Il y a très longtemps que la CGT ne
donne plus de consigne de vote. Mais, cette année, elle se prononce contre le
candidat sortant...
En 2012,
c'est un président en exercice qui prétend poursuivre son activité avec un
nouveau mandat. Nous pouvons faire le bilan de ses choix économiques, fiscaux
et sociaux. C'est désastreux! En plus, il en est le seul responsable.
Le gouvernement aussi!
Tout a été
fait à l'Elysée, dans les moindres détails, qu'il s'agisse de la
défiscalisation des heures supplémentaires ou du travail du dimanche. Quand
Dominique de Villepin a voulu créer le contrat première embauche pour les
jeunes en 2006, les manifestations ont été d'une telle ampleur, d'une telle
impopularité que Jacques Chirac lui a demandé de retirer son projet. Des
millions de Français ont défilé contre la réforme des retraites. Nicolas Sarkozy
s'est assis dessus. C'est un président autoritaire. S'il est réélu, il le sera
encore plus. Les droits sociaux passeront à la moulinette. La précarité
deviendra la règle.
Dans son programme, en 2007, Nicolas
Sarkozy avait affirmé qu'il créerait par la loi un contrat de travail unique.
Finalement, il a laissé les partenaires sociaux négocier. Elu, il a fait de
vous son « chouchou » sur l'échiquier syndical...
C'est sans
doute pour ça qu'il fait siffler la CGT dans ses meetings, comme en 2007, et
qu'il manie le mensonge en affirmant que je suis membre d'une instance du Parti
communiste!
Après les permanents de la CGT
d'Arcelor, c'est sur ceux de la CFDT que le chef de l'Etat concentre ses
critiques...
Toujours son
nouveau dada! Cette histoire de «corps intermédiaires » qui pollueraient ses rapports avec « le
peuple ». Il veut ainsi conquérir les voix
de Marine Le Pen. Bizarre: quand la présidente du Medef Laurence Parisot parle
d'un « quinquennat exceptionnel », elle
ne fait plus partie des corps intermédiaires à combattre.
Le 17 janvier dernier, la veille du
sommet social réuni à l'Elysée par Nicolas Sarkozy, vous avez participé à une
conférence de presse de Jean-Luc Mélenchon. Vous roulez pour le Front de
Gauche?
Nous avons
demandé à rencontrer les candidats: François Hollande, Jean-Luc Mélenchon, Eva
Joly et François Bayrou nous ont reçus. Le premier nous a raccompagnés à la
porte de son QG, où attendaient de nombreux journalistes. Pour la candidate des
Verts, il n'y avait que peu de représentants de la presse. François Bayrou n'a
pas souhaité médiatiser l'événement. Quant à notre rencontre avec le candidat
du Front de Gauche, elle a été très médiatisée. Cela dit, quand Jean-Luc
Mélenchon reprend notre volonté de porter le smic à 1 700 euros par mois, nous
ne pouvons qu'être d'accord! Même constat pour le candidat socialiste, s'il
permet de revenir sur la réforme des retraites.
Depuis deux ans, la lune de miel
entre la CFDT et vous, c'est terminé?
Nous
n'appréhendons pas les origines de la crise de la même manière. La CFDT n'est
pas favorable à des augmentations généralisées des salaires. Elle persiste à
croire, comme le Medef, que l'on peut défendre l'emploi grâce à des accords
dits de compétitivité, donc de flexibilité. Cela dit, nous avons encore des
points de convergence, comme la suppression de la défiscalisation des heures
supplémentaires.
Selon vous, quel sera le climat
social après la présidentielle?
Je ne suis
pas météorologue, et nos combats ne sont pas indexés sur le calendrier électoral.
Mais si Nicolas Sarkozy est réélu, la tension sera vive.
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