mercredi 28 novembre 2012

Un si fragile équilibre



Stress, suicides... de grands groupes ont dû trouver des solutions pour regagner la confiance de leurs salariés.

«La France est l'un des pays où la relation de confiance est la plus ténue. Le degré d'autonomie des salariés est faible, les contrôles sont réguliers. C'est une conséquence de l'organisation très hiérarchique et verticale des entreprises qui a à la fois un coût économique dans les sociétés de service et d'innovation, ainsi qu'un coût social en matière de bien-être», constate Yann Algan, professeur d'économie à Sciences-Po et auteur de la Fabrique de la défiance... et comment s'en sortir. Il vient d'être entendu par la commission Kaspar, menée par l'ex-secrétaire général de la CFDT pour améliorer les conditions de travail et le dialogue social.

 Mal-être.Cette commission est partie des difficultés rencontrées par la Poste. Le groupe a subi plusieurs vagues de restructuration depuis 2006 pour préparer l'ouverture à la concurrence. Résultat, les rapports annuels des médecins soulignent «une dégradation de la vie au travail» et les symptômes d'un mal-être se succèdent depuis plusieurs années : taux d'absentéisme en augmentation, épuisement physique ou psychique des salariés, suicides d'employés sur leur lieu de travail. En cause, un management autoritaire, stressant. Inspirée par les experts de la commission, la direction des ressources humaines réfléchit à une façon de décentraliser les décisions, d'améliorer l'autonomie des salariés et de restructurer le dialogue social.

Avant eux, France Télécom a été contraint de travailler dans l'urgence à un nouveau projet de management. Entre 2005 et 2009, l'entreprise avait durci sa gestion des ressources humaines pour atteindre un objectif de 22 000 départs volontaires. Une série de suicides avait pointé du doigt un système de mobilités forcées appliqué tous les deux ans et une vague de suppression de sites...

 «Proximité».Deux mesures suspendues depuis l'arrivée de Stéphane Richard à la direction. France Télécom a ensuite supprimé deux processus de contrôle très critiqués : la surveillance des salariés des plateformes d'appels grâce à un outil informatique et les feuilles de route optimales informatisées des techniciens chargés des réparations. «Depuis deux ans et demi, France Télécom a établi un nouveau contrat social et s'y tient. Il s'agit surtout d'un management de proximité», explique Alain Reynaud, auteur de Restaurer la confiance dans l'entreprise.

A la Société générale, c'est le lien de confiance entre la banque et les consommateurs qui avait été mis à mal suite à la révélation de l'affaire Kerviel le 24 janvier 2008. Le mois suivant, les conseillers clientèles ont essuyé une avalanche de critiques de clients mécontents comparant leur petit découvert à la somme de 4,9 milliards d'euros perdue par le trader. Rapidement, l'ensemble de la hiérarchie s'est réunie pour établir un argumentaire et l'a distribué à tous les salariés. L'initiative a été doublée de sondages sur le thème de la confiance accordée à la banque. Lancés dès février 2008, un audit et un plan appelé «Fighting Back» ont permis de construire un protocole de surveillance des opérations des traders. Une chose est sûre, retisser le lien de confiance après la crise demande du temps.


Léa Lejeune, Par Léa Lejeune

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