mercredi 12 janvier 2011


Le grand dessein d'une précarité systématisée


A moins de demander l’asile politique au Inuits et d’émigrer sur la banquise sans télévision, ni journaux, ni radio, il va falloir nous habituer d’ici 2012 à des assauts de provocation, des outrances populistes de la part d’une majorité présidentielle en panne dans les sondages et en grandes difficultés.

Quelles que soient les motivations profondes de l’ancien ministre de la Fonction publique, Christian Jacob, ses propos sur « l’embauche à vie » des fonctionnaires n’arrivent pas par hasard et même si elles ont été nuancées, il reste qu’elles arrivent à un moment où doivent s’ouvrir des négociations (le 11 janvier) entre les syndicats et le gouvernement au sujet de la précarité dans la Fonction publique.

Que Christian Jacob soit le président du groupe UMP à l’Assemblée, ne peut que renforcer les craintes. L’Union générale des fédérations de fonctionnaires CGT par la voix de son secrétaire général, Jean- Marc Canon a jugé ses propos « démagogiques » et « à côté de la plaque » [...] « S’il s’agit de recruter des agents en CDD, je dis et redis qu’il y en a déjà plus que dans le privé », a-t-il martelé. « Ou alors, il faut nous dire que sa vision du marché du travail, public ou privé, c’est de n’avoir que des agents précaires recrutés sur CDD », a-t-il ajouté.. « S’il s’agit de dire que des fonctionnaires peuvent au cours de leur carrière avoir des rebonds professionnels, changer d’emploi », il « existe tout un ensemble de dispositifs ».

Quant à aligner les fonctionnaires sur le droit commun par souci d’équité, il faut être clair, la précarité est si massive dans la Fonction publique qui emploie plus d’agents en CDD que dans le privé. Les propos de Christian Jacob doivent inquiéter les fonctionnaires et agents publics les plus qualifiés car le gouvernement n’a pas fait mystère de sa volonté d’introduire dans le futur projet de loi sur la précarité dans la Fonction publique la création d’un « contrat de projet », parfois appelé contrat d’objectifs. Alors, on peut se réfugier dans le déni et penser que le chef de file des députés de la majorité a lâché un ballon d’essai pour tes- ter les positions syndicales.

Mais on peut aussi légitimement s’inquiéter de la création de tels contrats précaires par les pouvoirs publics et les collectivités territoriales que par la suite le Medef demandera à généraliser aux salariés du privé. Et l’on verra ainsi des ingénieurs, des cadres et techniciens, des médecins effectuer des missions ponctuelles, sans aucune garantie et surtout avec une aliénation complète de leurs droits fondamentaux de citoyens. Des fonctionnaires dont les politiques pourront exiger sans vergogne une allégeance complète et une abdication de tout esprit critique.

On glisserait ainsi tranquillement vers une conception états-unienne de la Fonction publique où les fonctionnaires valsent au rythme des élections. On voit bien que derrière cette saillie démagogique, c’est un autre modèle social et politique qui se dessine. Il n’impacterait pas que les fonctionnaires. Jacob dit tout haut, ce dont Parisot rêve d’appliquer dans les entreprises.

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