mardi 8 juillet 2008
Réforme du temps de travail: «C’est la fin potentielle des jours fériés et des RTT»
Bernard Van Craeynest, président de la CFE-CGC, syndicat des cadres, dénonce le nouveau plafond de 235 jours travaillés par an pour les salariés soumis au «forfait» et critique une «atomisation» des 35 heures.
Que signifie concrètement pour les cadres ce nouveau plafond de 235 jours travaillés au maximum par an ?
Ça veut dire qu’on ouvre un peu plus la possibilité de travailler plus longtemps. Mais pas forcément pour gagner plus, puisque la majoration au-delà de 218 jours (plafond correspondant à 35 heures, ndlr) sera de 10% par jour, alors que pour les salariés qui sont au rythme horaire, la majoration est de 25% par heure supplémentaire. A 235 jours par an, c’est un potentiel de travail annuel de l’ordre de 2.500 heures. Quand vous savez que 35 heures c’est 1.607 heures, vous voyez l’écart… Ce n’est plus une remise en cause des 35 heures, c’est une atomisation!
Qu’en sera-t-il pour les jours fériés et les RTT ?
Très concrètement, ça veut dire que sur les 365 jours de l’année, on enlève 2 jours de repos hebdomadaire par semaine, soit 104 (52X2), moins 5 semaines de congés payés et un jour qui serait le 1er mai. Vous arrivez à 235 jours. C’est-à-dire plus de RTT et même plus de jours fériés. On pourra vous demander de travailler le 14 juillet, le 15 août et le 1er janvier ! Cette fin potentielle des jours fériés et des RTT, c’est très grave.
En cas d’accord d’entreprise, les salariés pourront-ils conserver leurs RTT?
Le gouvernement et Xavier Bertrand disent que tout cela sera borné par la négociation d’entreprise. Dans les grandes entreprises, ça ne devrait pas poser de problème. Mais dans les très petites entreprises, où il n’y a pas de représentants du personnel, ce sera des négociations de gré à gré entre employeur et salariés, qui auront beaucoup de difficultés pour s’opposer s’ils veulent garder leur emploi. Les petites entreprises subissent une pression des grandes, avec qui elle sous-traitent. Les grandes demandent aux petites de fournir à moindre coût. La variable d’ajustement, ce sont les salaires, l’emploi. Donc les salariés des petites entreprises auront la pression pour travailler davantage.
Le patron pourra-t-il imposer le plafond de 235 jours ?
Il pourra dire qu’il a la loi avec lui. C‘est d’autant plus scandaleux que le gouvernement a récemment souligné le problème de la santé au travail, des risques psycho-sociaux. Le législateur doit être protecteur, notamment pour la santé au travail. Or le gouvernement fait l’inverse de ce qu’il dit. Il permet les conditions pour altérer la santé des salariés.
Les salariés des entreprises moyennes ou grandes, où les accords d’entreprise seront plus faciles, sont-ils pour autant protégés ?
Jusqu’à présent, avec le plafond à 218 jours par an, il y a eu des accords en dessous du plafond. Mais là, avec un plafond de 235 jours, les négociations ne viseront pas à maintenir les 218 jours, mais pourront amener à porter le plafond à 220 ou 225 jours. Encore faut-il qu’il y ait un accord collectif d’entreprise. Pour cela, il faudra un rapport de force. Là où il existe une capacité à défendre les intérêts des salariés, le patron ne pourra pas faire ce qu’il veut. Mais il pourra dire aussi in fine, «si vous n’acceptez pas de travailler plus, je délocalise, je diminue l’activité sur le site.»
Le texte doit encore passer devant le Sénat. Espérez-vous une modification ?
Nous travaillons auprès des sénateurs. Nous allons voir le rapporteur du texte aujourd’hui pour lui faire comprendre notre position. Nous constatons que le Sénat a su se montrer plus raisonnable que les députés ces derniers temps. Mais il y a eu une déclaration d’urgence, c’est-à-dire qu’après le passage au Sénat, et un éventuel passe en commission mixte paritaire en cas de désaccord, la loi sera adoptée. Si le texte définitif reste en l’état, nous déposerons un recours auprès de la Cour de justice des communautés européennes.
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