vendredi 3 octobre 2008

Qu’ils paient leur crise !


La crise actuelle qui frappe les principaux centres du monde financier, à commencer par Wall Street, représente bel et bien une faillite globale du capitalisme. Non seulement parce que des piliers du système bancaire américain ou européen, jusqu’alors insubmersibles, ont sombré, mais également parce que les conséquences de cet immense krach rampant qui, depuis plus d’un an, mine le système capitaliste, vont toucher l’ensemble de l’économie et la majorité de la population. De nouveaux démantèlements de droits sociaux, de reculs du pouvoir d’achat, de licenciements pourraient être la conséquence de cette crise, si le monde du travail, la population ne réagissaient pas pour la faire payer à leurs auteurs : les capitalistes.

L’accord qui a été passé entre les deux partis gestionnaires du capitalisme américain et, par là même, entre les deux prétendants à la succession de Bush, illustre l’ampleur de la crise. La dramatisation volontaire du discours du président américain (singée, quelques jours plus tard, par son homologue français) vise à faire accepter à la population laborieuse américaine les sacrifices « nécessaires ». Mais elle indique aussi la panique des principales autorités, qui ont hésité entre la purge (laisser sombrer les canards boiteux) et l’intervention massive des pouvoirs publics, afin de sauver les piliers du système.

Le plan de 700 milliards de dollars de sauvetage provoque des remous au sein même de la citadelle impérialiste. En effet, voilà qu’une telle somme est mobilisable en quelques heures au profit de firmes et d’actionnaires qui se sont enrichis dans la période spéculatrice précédente. Alors que, pour satisfaire des besoins élémentaires, l’argent manque et ne pourrait être débloqué aussi rapidement. Comme quoi, dans ce système, ce ne sont pas les capitaux qui manquent, mais la nature de l’urgence qui commande !

Les plus ultralibéraux, ceux qui nous vantaient hier les capacités naturelles du marché à s’autoréguler, sont passés avec armes et bagages du côté de l’intervention tellement décriée de l’État. Finie la main invisible du marché, voici le retour du bras séculier de l’État capitaliste. Un État providence pour les plus riches, pour les grands actionnaires, pour les puissants. Et, sans vergogne, ceux et celles qui, au nom de la toute-puissance du marché, ont depuis vingt-cinq ans, à droite comme à gauche, mené des politiques libérales destructrices des droits et des revenus des travailleurs, se convertissent en une nuit en farouches pourfendeurs du capitalisme financier. Sarkozy essaye ainsi de décortiquer le capitalisme. D’un côté, un capitalisme sain, industriel, productif ; de l’autre, un capitalisme sale, spéculateur. D’un côté, la jungle, de l’autre, l’État régulateur. Si les conséquences sociales d’une telle crise n’étaient pas aussi graves, les propos présidentiels pourraient faire rire. Qu’il se penche un instant sur la constitution de la fortune de ses amis, et il se rendra compte de l’absence d’étanchéité entre industrie et finance. Cela fait plus d’un siècle que le capital bancaire et le capital industriel ont fusionné !

C’est donc bien toute l’économie capitaliste qui entre, le mot est désormais lâché, dans une récession en cours de mondialisation. C’est ce qu’a reconnu le président de la République, dont l’action est désormais cadrée par un contexte économique dépressif. Et le nouveau converti au capitalisme régulé de nous asséner ses évidences : « La crise est là, elle sera dure, et il faudra faire encore des sacrifices. » D’ailleurs, tout change, nous dit-il, ce sont trente ans de confiance au tout-marché qu’il faut remettre en cause. Mais pour poursuivre la même politique, puisque les « réformes » doivent être accélérées ! C’est-à-dire, encore plus de déréglementations, de privatisations, de ponctions sur le pouvoir d’achat, d’exonérations de charges… Que tout change, pour que rien ne change ! Le tout justifié par cette affirmation péremptoire. Il n’y a pas de choix, car l’anticapitalisme, c’est le collectivisme et le retour aux expériences terribles du xxe siècle.

Acceptons cet hommage du vice à la vertu. Il n’y a pas d’alternative à cette crise profonde du système dans le cadre capitaliste, sans un coût social, humain, écologique insupportable pour l’écrasante majorité de la population. Le marché ne peut pas être la mesure et la solution de l’ensemble des problèmes qui frappent l’humanité. Cette crise qui démontre une nouvelle fois l’absurdité d’un système dont le moteur est le profit, pose avec encore plus d’acuité la nécessité de la rupture avec le capitalisme. En choisissant de construire un parti anticapitaliste, nous relevons ce défi. Le défi des luttes, des mobilisations, des grèves, pour que les exploités et les dominés ne paient pas le coût d’une crise qui n’est pas la leur. Mais aussi le défi d’une politique de rupture révolutionnaire avec ce système, fondée sur la défense d’un programme de mesures d’urgence, sur l’invention d’un socialisme aussi profondément démocratique qu’égalitaire. ■

Pierre-François Grond

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