vendredi 31 juillet 2009


Le scandale de la formation professionnelle

Pour lutter contre le chômage, la France dépense beaucoup plus que ses voisins. Pourtant, ses résultats sont exécrables. Parmi les raisons : des frais de gestion démentiels et des milliards détournés.

Décidément, dans le 93, l’ascenseur social est vraiment en panne. Car enfin, pourquoi l’Afpa (Association nationale pour la formation professionnelle des adultes) a-t-elle fermé du jour au lendemain ce stage d’ascensoriste organisé dans son centre de Stains ? Alors même que les élèves étaient quasiment sûrs, grâce à lui, de trouver un job : «Plus de la moitié d’entre eux recevaient une promesse d’embauche au cours de la scolarité», se souvient Michel Battiau, le professeur. Il faut dire que, pour répondre aux exigences de la nouvelle réglementation, dans toutes les villes, des dizaines de milliers de copropriétés se bousculent pour moderniser leurs ascenseurs. Et que les grands du secteur, Schindler, Kone ou Otis, ont un mal fou à trouver du personnel.

«Aujourd’hui, dans ce secteur, tous stages et écoles confondus, la France forme 200 à 300 techniciens par an, alors qu’il en faudrait au moins le double», relève Michel Battiau, en levant les bras au ciel. Pourquoi diable, alors, l’Afpa a-t-elle abandonné son cursus ? Parce qu’il coûtait très cher, répond la direction. Du coup, on fait venir des spécialistes d’Europe de l’Est. Et nos ascensoristes en herbe restent au chômage…
Pas de doute, quelque chose ne tourne pas rond dans notre système de formation professionnelle. «Rien ne fonctionne dans ce grand bazar», s’emportent les économistes Pierre Cahuc et André Zylberberg, auteurs de l’un des nombreux rapports sur la question. «Notre dispositif est complètement incohérent», s’énerve en écho le sénateur UMP de Haute-Savoie, Jean-Claude Carle. «Inéquitable et à bout de souffle !», renchérit Nicolas Sarkozy, qui promet depuis des mois de le remettre à plat. A sa demande, les députés devraient examiner cet été un projet de réforme censé moderniser l’animal.

Eh bien, il va y avoir du boulot ! Avec ses 48 600 organismes recensés, ses centaines de milliers de stages dispensés tous les ans, ses 7 millions de bénéficiaires annuels, ses dizaines de milliers de professeurs en exercice, ses 3 ministères de tutelle et ses 27 milliards d’euros de budget (l’équivalent de la moitié de l’impôt sur le revenu), notre système de formation continue paraît presque aussi effrayant que le mammouth de l’Education nationale. Et, ce dossier le prouve, les dérives y sont plus nombreuses encore. Absence de contrôles, tuyauterie financière d’une complexité effarante, stages bidon, frais de gestion gargantuesques, sans parler du financement occulte du patronat et des diplômes qui ne mènent à rien… «Voilà un des plus gros gaspillages de l’Etat», résume Pierre Cahuc. Pas étonnant que le dispositif ne parvienne pas à remplir les deux missions fondamentales que lui a confiées la République.

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Marie Charrel

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