lundi 11 janvier 2010


H1N1 : La pandémie vire à la pantomime

La grippe H1N1 qualifiée par certains de «gripette»restera sans doute dans les annales. Pas comme la grippe espagnole qui fit plus de mort que la Première guerre mondiale. Mais plutôt comme un modèle du genre en matière de gestion politique d’une question de santé publique.

La reculade du gouvernement qui vient d’annuler les commandes faites aux labos vient à point pour étouffer un scandale politique. Voilà des mois en effet que des voix se sont élevées pour s’émouvoir de la collusion possible entre les sphères décisionnelles et les grands labos pharmaceutiques.

«Les laboratoires ont organisé la psychose», accuse l’épidémiologiste allemand, président de la commission de la santé du Conseil de l’Europe, le docteur Wolfgang Wodarg. Et il ajoute
«nous avons eu une grippe bénigne et une fausse pandémie».

Dans un entretien au journal l’Humanité, il parle de «l’un des plus grands scandales médicaux du siècle». A ce sujet, il a obtenu à l’unanimité la mise en place d’une commission d’enquête au Conseil de l’Europe sur le rôle joué par les laboratoires dans la gestion de la grippe A par l’OMS et les États. Le docteur Wolfgang a avoué avoir été très surpris par les chiffres qu’avançait l’OMS pour justifier de la proclamation d’une pandémie en avril dernier quand la première alarme est venue de Mexico. «Les chiffres étaient très faibles et le niveau d’alarme très élevé», a-t-il relevé et d’ajouter: «on n’en était à même pas mille malades que l’on parlait déjà de pandémie du siècle». Or pour atteindre un tel niveau d’alerte, il aurait fallu que la maladie éclate dans plusieurs pays à la fois et qu’elle ait des conséquences très graves avec un nombre de cas mortels au-dessus des moyennes habituelles.

Cette affaire pose donc d’abord la question de la gouvernance mondiale en matière de santé. Car c’est sur la foi de ces alertes que notre gouvernement prétend avoir lancé dans la précipitation que l’on a constatée un plan d’envergure inégalée qui doit plus au «principe de précaution»qu’aux besoins de santé. Et l’on peut donc s’interroger sur l'émergence d'un «ministère de l'industrie pharmaceutique»comme le souligne la CGT qui demande: «Quel est le rôle du ministère de la Santé? Est-ce d’être au service de l'industrie pharmaceutique?»Roselyne Bachelot a beau prétendre «ne pas avoir de gourou à la solde des labos», un de ses experts régulièrement consulté sur la grippe, est à la fois chef de laboratoire de virologie au CHU de Lyon, directeur de l’unité du CNRS pour le H1N1 et président du Groupe d’expertise et d’informations sur la grippe. Lequel est une association qui regroupe les trois industriels qui produisent le vaccin (Sanofi, Novartis et GSK).

Plusieurs éléments parmi d'autres sont «particulièrement troublants», relève la CGT : «non transparence des contrats passés avec les laboratoires pharmaceutiques, prise en charge par l'État de toutes les complications liées aux vaccins, prix surévalués (...), refus de prendre en compte à temps la nécessité d'une seule injection».

Et on notera le peu d’exigences de l’État vis-à-vis de l’industrie. Sanofi-Aventis engrange de confortables bénéfices confortés par la Sécurité sociale et prévoit par ailleurs de supprimer dans le même temps 1300 emplois et de fermer quatre centres de recherche en France. Dans cette affaire, c’est bien le politique qui a été grippé et il faudra que tous les éléments, notamment financiers, soient rendus publics dans les meilleurs délais. Il en va de la démocratie.

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