lundi 17 janvier 2011



Idéologie et dogmatisme à la manœuvre



Le débat sur les 35 heures et sur le coût du travail a été soigneusement alimenté ces dernières semaines à l’occasion ou en marge des vœux. La semaine passée, la ministre de l’Économie, Christine Lagarde a estimé que le débat sur les 35 heures était un « vieux débat mort et enterré », appelant plutôt à s’interroger sur le coût du travail en France. Il est vrai qu’après avoir largement introduit des dérogations et tripatouillé les textes, l’intérêt d’une remise en cause frontale et définitive a pu paraître inutile jusque dans les rangs du Medef.

L’extrême prudence sur ce sujet est à mettre en rapport avec la très forte sensibilité de l’opinion sur cette question. De sondage en sondage, les salariés refusent la fin des 35 heures et ne croient pas à son utilité pour renouer avec la compétitivité. Mais les propos de Christine Lagarde ne sonnent pas la fin de la récré. Ils doivent nous alerter sur la volonté réaffirmée de baisser encore le coût du travail qui est un thème constant dans le discours du Medef. Cette antienne patronale trouve de larges échos au sommet de l’État. Elle est prêchée comme un dogme, une véritable idéologie. C’est l’un des griefs formulés par Éric Verhaeghe, le président de l’Apec, qui a rendu la semaine dernière tous ses mandats détenus au nom du Medef. Le discours sur le coût du travail en France trop élevé selon le patronat en particulier, l’inquiète : « en pesant sur les conditions de vie des salariés, on pousse ceux-ci à s’endetter pour vivre. Or, la crise a démontré les dangers de l’endettement ». (...) Il est dangereux de répéter à l’envi que le coût du travail est trop élevé », ce qui aboutit à la « modération salariale » et à l’endettement « massif » des salariés et favorise socialement «l’extrémisme». (...) Face à la crise, le monde patronal doit assumer ses responsabilités, prendre sa part d’effort et ne pas chercher à alléger au maximum son fardeau en le transférant sur la majorité laborieuse. (...) Sur un plan moral, lance-t-il, « rien ne justifie que le remboursement de la dette soit assumé par les plus bas revenus » qui en « profitent le moins ». Il appelle les élites à « ne pas se comporter comme une noblesse d’ancien régime » et les exhorte à « un sursaut républicain ». On ne se plaindra pas qu’un patron tourne sa veste dans un sursaut de lucidité. Cette sortie a au moins l’intérêt d’alimenter le débat et de montrer la collusion idéologique entre le patronat et l’exécutif.

On avait vu combien toutes les gesticulations et les coups de menton de Nicolas Sarkozy au début de la crise avaient surtout pour but de « tout changer » pour que rien ne change et que tout recommence. Sa gouvernance, ses réformes et notamment celle du système de retraite, sont conduites pour donner des signes aux agences de notation et répondre aux desiderata patronaux. Tous les mécanismes qui ont conduit à la crise sont perpétués, tandis que l’on taille en pièces tous les boucliers de la protection sociale et du service public dont on a pu mesurer qu’ils étaient des amortisseurs efficaces de la crise.

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