« Les salariés
victimes d'accident du travail subissent des pressions... en vue de les faire
renoncer en partie ou en totalité à un arrêt de travail », révèle un premier
document.
A la suite du
reportage de TF1 du 28 février 2012 accusant Michelin de dissimulation
d'accidents du travail, la direction de Michelin a répliqué dans un communiqué
en qualifiant ces accusations de « graves et fausses ». Ce n'est manifestement
pas l'avis des services de l'inspection du travail. Deux de ses rapports en
témoignent.
Il ressort
ainsi de l'enquête conduite depuis 2009 par un inspecteur du travail de
Bordeaux sur les pratiques de Michelin à l'usine de Bassens, « que les salariés
victimes d'accident du travail subissent des pressions de la part de leur
encadrement de proximité en vue de les faire renoncer en partie ou en totalité
à un arrêt de travail. Ces pressions se manifestent par des appels
téléphoniques au domicile du salarié et/ou par une visite physique le jour même
ou dans la semaine de leur arrêt de travail, note le fonctionnaire. Il est
entendu que ces prises de contact aboutissent rapidement à demander de façon
insistante au salarié s'il accepterait d'occuper temporairement un poste de travail
aménagé sous la menace à peine voilée de porter atteinte à sa carrière. Dans
les cas fréquents où le travailleur accepte la proposition qui lui est faite,
il lui est alors demandé expressément de prendre rendez-vous auprès du médecin
traitant conseillé par l'établissement en vue de mettre un terme à son arrêt de
travail ».
Lorsque la
proposition de poste aménagé est validée par l'infirmière, « il apparaît, après
examen des bulletins de salaire, que ces derniers ne mentionnent pas de jour
d'arrêt de travail » mais apparaissent des « permissions payées » et des «
primes de contribution » pour les périodes concernées « qui viennent compenser
et remercier les efforts consentis par les travailleurs ».
Le résultat,
souligne l'inspecteur, est que Michelin parvient ainsi « à baisser la charge
des cotisations dues au titre des accidents du travail, et des maladies
professionnelles ( ) en minorant volontairement et artificiellement le nombre
de journées d'arrêt de travail ».
A
Clermont-Ferrand, dans un courrier adressé à la CGT qui l'avait alerté et que
celle-ci a rendu public, l'inspecteur du travail informe le syndicat que, sur
la base des éléments relevés au cours de son enquête, il existerait au sein de
l'établissement des Gravanches, site de production à la limite de
Clermont-Ferrand, des pratiques non isolées telles que notamment : «
non-déclaration d'accidents du travail ; enregistrement d'accidents ayant
entraîné des soins médicaux au registre des bénins ; déclaration erronée
d'accidents du travail ne faisant pas état d'arrêts de travail ».
A la suite
des entretiens qu'il a eus avec plusieurs salariés, l'inspecteur relève des
pratiques condamnables, notamment « l'accompagnement quasi systématique à
l'infirmerie et/ou au CHU du salarié accidenté avec des recommandations plus ou
moins fermes et insistantes à ne pas se faire prescrire d'arrêt de travail ».
L'inspection du travail a saisi la justice et une enquête est en cours.
P.
I.
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