lundi 7 février 2011

AGIR AVEC COURAGE ET FAIRE SUER LE BURNOUS


Au long inventaire des occasions manquées, la justice a ajouté jeudi dernier un nouvel événement qui aurait pu faire date. En effet, le tribunal correctionnel de Toulouse a jugé jeudi que l'action du syndicat CGT d'Airbus contre le système d'évaluation des cadres du constructeur aéronautique était « irrecevable » pour des raisons de procédure. Le délégué central de la CGT, Xavier Petrachi, a déploré une décision de « pure forme » qui évite « d'aborder le fond du dossier ». Le syndicat avait réclamé à l'audience le 6 janvier l'interdiction de la prise en compte de critères de comportement dans l'octroi des primes aux cadres alors qu'Airbus revendiquait d'évaluer non seulement leurs résultats mais aussi leur défense des « valeurs » de l'entreprise. La CGT s'insurgeait particulièrement de la demande faite aux cadres de montrer leur capacité à « agir avec courage ».


Le tribunal a estimé que le mandat donné par le syndicat CGT et UGICT-CGT à ses dirigeants pour agir en justice n'avait pas été régulier. Sans statuer sur le fond, le tribunal a toutefois regretté que cette « légèreté procédurale » fasse obstacle à ce « que le tribunal puisse examiner la question, méritant débat, posée sur le fond, à savoir la possibilité d'intégrer la notion de courage dans une grille d'évaluation ». Agir avec courage, voilà en effet une surprenante et intéressante notion. Renverrait-elle à une rhétorique guerrière chère au patronat qui évoque si facilement la guerre économique ? Ah qu'elle est belle l'image du cadre, sifflet à la bouche sortant de la tranchée tel le « sous off » de base entraînant ses poilus torse en avant vers la mitraille. A moins que le vrai courage soit de dire « non » et d'en finir avec ces formes de management dont on verra cette semaine une belle illustration avec la diffusion sur France 5 du documentaire « Orange amère » réalisé chez l'opérateur de télécommunication par Patricia Bodet et Bernard Debord. Un film où l'on voit que malgré des initiatives multiples pour déstresser les salariés: cours de Qi Gong, dégustations de crêpes, barbecues ou tombolas, certains employés évoquent toujours « la boule au ventre » à l'annonce des objectifs de vente en début de mois. Un film où l'on voit un manager qui déclare son enthousiasme pour les barbecues, mais qui n'oublie pas ses objectifs. Au point de lancer à son équipe sous l'œil de la caméra : « le haut débit, c'est la catastrophe. J'ai honte, j'ai honte pour vous ».


C'est sans doute ce courage-là que le patronat veut voir assumer par l'encadrement. Des cadres qui savent faire suer le burnous. Ce n'est résolument pas la conception que nous nous faisons du rôle et de la responsabilité de l'encadrement


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